J’adore aller à Harajuku, même si ça me coûte toujours presque tout mon argent de poche. Je n’y peux rien, quand je vois des jolis vêtements, j’ai envie de les acheter. Et sur cette rue pleine de magasins créés principalement pour attirer filles, c’est un paradis de jolis vêtements. Il y a aussi des accessoires, des souliers, des sacs et même des vendeurs de crêpes et des cafés pour prendre une pause entre deux magasins. Bref, j’adore ça, même si je ne peux jamais acheter tout ce que je veux. J’ai un avantage par contre. Je peux y apporter ma maman et lui demander de m’acheter quelques vêtements, parce que bah, c’est important les vêtements et pour ça, elle dit oui plus facilement que pour du maquillage ou des CD de musique ou des jeux.

Sauf que pour quelques semaines encore, mes parents ne sont pas là et je ne pense pas que ça serait aussi efficace d’apporter Chinatsu. Alors j’ai décidé de prendre des photos de ce que je veux, parce que peut-être que si je les envois à mes parents, ils vont me donner un peu plus d’argent pour acheter les vêtements. Je ne devrais peut-être pas, mais je regarde mes photos en marchant pour retourner à la gare, parce qu’il faut bien que je retourne à l’appartement avant le repas, sinon Chinatsu va s’inquiéter. Et mes photos sont tellement jolies et j’ai tellement hâte d’avoir ces vêtements que je ne peux pas m’empêcher de les regarder.

Je suis comme ça des fois, quand je me concentre sur quelque chose, je suis vraiment concentrée, assez pour que prenne du temps à réaliser ce qui vient de se passer. On m’a stoppée dans mes pas, mais pas parce que j’ai foncé dans quelque chose, je l’aurais senti sinon. En relevant les yeux, je n’arrive à dire qu’une chose.

- Oh.

Devant moi, il y a plein de voitures qui passent vite, comme toujours aux grandes intersections. C’est pour ça qu’il y a les lumières pour les piétons et je pense qu’on vient juste de me sauver d’un accident, sauf que ça n’a pas encore vraiment enregistré dans ma tête.

- Autre chose, mademoiselle ?

Akane releva le tête vers le jeune homme qui venait de la desservir de son café, un air charmeur sur le visage. Cheveux noirs, yeux noirs, le parfait japonais de base. Elle soupira inaudiblement. Dommage pour toi mon petit gars, songea-t-elle avec ennui, pas envie d'un mec ce soir. Par contre, ta collègue... Elle fût tiré de ses pensées - et de sa contemplation intense de la jolie serveuse blonde - par la voix du serveur, qui lui redemandait si elle voulait quelque chose d'autre. Elle planta ses yeux verts dans ceux de l'employé, le fixant avec un léger sourire.

- Juste l'addition, s'il vous plaît, fit-elle d'une voix douce, presque chuchotante, tout en passant légèrement une main dans sa chevelure rousse.

L'effet fût immédiat. Le jeune homme rougit, bredouilla vaguement qu'il allait la chercher. Akane sourit de plus belle, satisfaite. Elle voulut reprendre son occupation précédente - à savoir mater les fesses de la blondinette - mais celle-ci était partie. Akane soupira, ennuyée. Elle sortit un miroir, se remaquillant légèrement, tout en pensant à ce qui l'attendait bientôt. Oui, bientôt, elle intègrerait la prestigieuse académie Saotome, dont elle avait toujours voulu faire parti... Simplement, elle ne le ferait pas de la manière dont elle aurait voulu. Surveillante... Akane se passa encore une fois une main dans les cheveux, histoire d'éviter que ceux-ci ne retombent devant ses yeux. 

Surveillante, mais qu'est-ce qui l'avait prit bon sang ?! Elle posa ses coudes sur la table et se prit la tête entre les mains. Mais quelle bonne idée, pensa-t-elle ironiquement, allons donc bosser dans l'académie de tes rêves, histoire de voir plein de jeunes réaliser leurs rêves et de constater, encore une fois, à quel point tu as foiré ! Un "Mademoiselle ?" la sortit de ses lamentations silencieuses. Elle tourna la tête vers celui qui avait osé déranger ses pensées, qui n'était autre que - mais quel surprise ! - le serveur, qui la fixait d'un air inquiet. Elle lui offrit un charmant sourire pour le rassurer, avant de saisir l'addition et son porte-monnaie, et de tendre au serveur la somme exacte de sa consommation.

- Eh bien... fit-il d'une voix laissant transparaître son hésitation, repassez nous voir quand vous voulez. Il se pencha vers elle, lui glissant un papier dans la main. Et si vous avez besoin de quoi que ce soit... Appelez-moi !

Tandis que le serveur repartait faire son service, Akane se leva et rassembla ses affaires et ses sacs de shopping. Elle contempla le numéro de téléphone griffonné sur le bout de papier, avant d'ouvrir son sac pour le glisser dans son carnet d'adresse. Pourquoi pas après tout ? Même si elle ne pensait pas appeler, ça ne coûtait rien d'essayer... Son sac à main en bandoulière et ses sacs de shopping accrochés à son bras, elle reprit sa route pour rentrer chez elle. Elle se gifla mentalement pour avoir acheté autant de nouveaux vêtements, comme si elle en avait besoin, sa - ridiculement petite soit dit en passant - armoire était remplie ! 

Mais bon, elle était comme ça. A la base, elle voulait juste prendre un café... Mais toutes ces boutiques l'avaient attirée ! Et du coup elle avait totalement craqué ses pourboires du mois dernier, ainsi qu'une bonne partie de son salaire. Une autre merveilleuse idée de travailler comme surveillante alors qu'elle bossait déjà au Maid Café ! En plus, elle ne pouvait plus y travailler à temps complet, devant donc seulement y travailler à mi-temps. Elle regarda autour d'elle. Les gens passaient, allaient et venaient, toujours plus nombreux. D'autres auraient trouvé cela agaçant et oppressant, mais Akane aimait bien la foule.

Elle aimait regarder les gens qui l'entouraient. Là-bas, un jeune couple avec un bébé dans une poussette qui entraient dans un restaurant, là-bas de jeunes filles riant toutes ensemble en sortant d'une boutique, là-bas de jeunes enfants qui s'amusaient à courir entre les autres passants, là-bas une jeune fille d'apparence adorable avec de longs cheveux blonds qui s'apprêtait à travers- eh, quoi ?!

Akane s'avança à pas rapide vers la jeune fille. Cette dernière ne semblait pas l'avoir remarqué, ni elle ni le trafic juste devant, trop concentrée sur son portable. Avant qu'elle ne puisse poser un seul pied sur la chaussée, Akane l'attrapa par les épaules, pour la retenir. La jeune fille sembla mettre du temps à assimiler ce qui venait de se passer, regardant les voitures passer à toute vitesse devant elle.

- Eh bien, fit Akane d'une voix sévère, il faudrait peut-être décoller le nez du téléphone et regarder un peu où l'on va, non ? Tu te rends compte que tu aurais pu être percutée par une voiture ?!

Elle réajusta légèrement sa veste tout en fixant la jeune fille dans l'attente d'une réaction, n'importe laquelle, tout en fronçant les sourcils. Cela aurait pu mal finir ! Néanmoins, sa colère de tarit, pour laisser place à de l'inquiétude, suivi d'un instinct protecteur envers la fillette. Oui, cela aurait pu très mal finir. Elle s'adressa de nouveau à la jeune fille, radoucissant sa voix.

- Ça va, tout va bien ? Elle lui sourit gentiment, avant d'ajouter : Je m'appelle Hori Akane, et toi ?

Je reviens à moi alors qu'une voix me chicane pour la gaffe que j'ai fait. Je sais que c'est dangereux et que j'aurais du faire attention. Je me sens un peu mal parce que je le sais et que c'est pas la première fois qu'on me le dit, mais cette fois-ci, ça aurait pu finir vraiment mal et je suis quand même vraiment contente d'avoir été retenue.

- Désolée. Je promets de vraiment faire attention à l'avenir.

Je n'aime vraiment pas ça quand on me réprimande, encore plus quand la personne a raison de le faire parce que je ne peux dire dire dans ces moments là. La seule chose que je peux faire, c'est baisser la tête et m'excuser. Au moins, on dirait que la personne n'est pas fâchée très longtemps et en l'entendant me demander gentiment si j'allais bien, j'ai doucement relevé la tête. La femme qui m'a sauvé d'un accident doit avoir environ 20 ans et de mon point de vue, elle est très belle. Je serais très contente si je pouvais avoir les mêmes proportions en grandissant, mais ce n'est pas pour tout de suite on dirait.

- Ça va. Un peu sous le choc, mais ça va, je n'ai rien grâce à vous. Merci infiniment.

Je ne suis plus tant sous le choc que ça, mais je n'en reviens pas encore. Ce qui vient de m'arriver, on voit juste ça dans les films et dans les animes, c'est pas supposé se passer dans la vraie vie. Mais parce que c'était pas un si gros savon que ça qu'elle m'a passé et parce qu'elle a l'air vraiment gentille, ça ne me prend vraiment pas beaucoup de temps pour retrouver mon sourire habituel. C'est à dire un grand sourire de fillette qui n'a pas d'autre soucis que celui d'hésiter entre deux pairs de souliers pour aller avec son nouvel ensemble.

- Je m'appelle Tanaka Himawari. Enchantée de vous rencontrer et encore une fois, merci beaucoup de m'avoir éviter un accident.